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dans de la terre fraîchement remuée, attira son attention. Mais la peur d’apprendre la date l’empêcha d’avancer et aussi d’autres choses obscures. Il lança son bouquet sur la tombe.

Au sortir du cimetière, il songeait :

— En réalité, il n’est pas sûr qu’il soit mort par moi. Rien ne me le prouve.




DEUXIÈME PARTIE

I


De retour au Havre, Marc Hélienne communiqua son adresse à Me Pichard, notaire de son père.

Ce fut alors l’attente anxieuse de la lettre qui le convoquerait en l’étude. Anxiété légitime : son père avait-il eu le temps de le déshériter, suivant l’intention exprimée ? Et d’autre part, ne s’était-il pas, lui, illusionné sur la valeur de la succession ?

Ces hypothèses, négligées jusqu’ici pour n’en point mêler l’amertume aux tourments qu’il subissait, il fallait bien les envisager. Qu’elles fussent seulement admissibles, exaspérait Marc. C’était une révolte d’homme qui s’est donné beaucoup de mal et dont on conteste la récompense. Sa notion de justice s’en trouvait froissée. Équitablement, on doit être rémunéré selon ses efforts. Il ne supputait pas les siens d’après leur nature, mais d’après leur nombre, leur difficulté, leur persévérance, surtout d’après la somme de douleurs qu’ils représentaient. De fait, à ce compte, ils étaient dignes de succès.

L’argent lui manqua. L’hôtelier le traitait avec insolence. Marc eut la