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la fortune de m. fouque

il empocha la lettre. Puis il manda son principal contremaître, lui dicta ses ordres d’un air détaché, et lui enjoignit spécialement de surveiller les travaux de la nouvelle école communale.

Aussitôt seul, il reprit la lettre ; malgré lui elle le taquinait, et il l’examina, l’étudia avec une minutie anxieuse. Il ne put cependant reconnaître cette écriture tremblée, dansante, évidemment contrefaite. Certes il ne doutait pas de Mme Fouque, la vertu de Julie lui semblait inattaquable et son orgueil personnel lui défendait de soupçonner sa femme. Et pourtant quelle précision terrible dans cette dénonciation anonyme ! Le jour, l’heure, l’endroit, aucune preuve ne manquait.

Soudain ses yeux tombèrent sur un calendrier :

— Mercredi, s’écria-t-il, c’est aujourd’hui !

La nécessité d’une détermination immédiate le tourmenta. Devait-il se confier à Julie, ou bien l’espionner, ou plutôt se taire et dédaigner une calomnie absurde ?

Ce dernier parti lui plaisait par sa simplicité et surtout l’empêchait de se lancer dans une aventure dont le résultat l’inquiétait à son insu.