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la fortune de m. fouque

gestes larges qui accompagnaient les longues périodes et des gestes brusques qui scandaient les phrases plus courtes. Il ralentissait son débit, le précipitait, haussait la voix, la baissait, en un mot ménageait ses effets comme un orateur à la tribune :

Il continua :

— Mon premier mouvement, je l’avoue, fut de briser tout, de massacrer les coupables. Et puis, quoi ! me dis-je, si ce ne sont pas eux ? Si ce n’est pas ma femme ? Deux femmes peuvent avoir la même toilette, la même tournure, la même démarche. À une certaine distance, une erreur est possible. Donc je devais d’abord vérifier mes soupçons. J’examinai la cabane. Il n’y avait qu’une fenêtre étroite qui s’ouvrait à une hauteur de six ou sept pieds. Autour de moi, rien, pas de grosse pierre, pas de bûche. Que faire ? Longtemps je me creusai le cerveau inutilement. Enfin je découvris un moyen. Doucement j’arrachai de l’herbe et je la présentai à l’âne. Il s’avança, renifla à plusieurs reprises et en happa quelques brins. Je renouvelai l’expérience, l’attirant, m’efforçant de le ranger le long de la cabane. J’y réussis. Alors j’amoncelai de l’herbe