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un amour

Un incident survint, dont les conséquences la réconfortèrent momentanément. En revenant d’un séjour à Rouen vers le mois de novembre, Marthe eut comme vis-à-vis dans le train un enfant, un garçon. Intéressée, elle observait ses gestes vifs, ses espiègleries, écoutait ses questions naïves, s’amusait de ses étonnements et de sa curiosité, et le petit répondait à son regard bienveillant par de jolis sourires d’enfant heureux qu’on s’occupe de lui. À la fin, elle se pencha et lui demanda :

— Quel âge avez-vous ?

Il prit un air sérieux et prononça hardiment, comme s’il était fier de sa réplique :

— Cinq ans, madame.

— Cinq ans, soupira-t-elle.

Puis, se tournant vers Civialle, elle ajouta :

— C’est son âge à lui.

Il lui serra la main sans répondre, et, jusqu’au terme du parcours, elle poursuivit de ses yeux mornes l’enfant inquiet et subitement attristé.

De retour à la campagne, elle était si faible qu’on dût la coucher. Elle se remit vite, et, un matin, le docteur l’autorisant à sortir, elle se couvrit de châles et s’empara du bras de Civialle.