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un amour

ses mains, ses yeux s’étaient enivrés de la douceur de cette peau, de la perfection de ces tonnes ; il se rappelait sa façon d’embrasser, d’étreindre, de s’abandonner. Pourtant, il restait là, immobile, aussi étranger qu’un visiteur qui entre, cause un instant, et s’en va, sa tâche accomplie.

Et soudain sa jalousie l’assaillait. Peut-être, sous la robe dont il la dévêtait, des traces récentes de baisers marbraient-elles sa chair, de ses baisers, à lui, à l’autre !

Un soir, il lui exposa sa détresse, d’une voix humble :

— Je vois que toute votre conduite envers moi n’est qu’une vengeance ; vous voulez que j’expie ma lâcheté, que je pleure mon offense sans répit. Eh bien, Marthe, cette torture est au-dessus de mes forces. Vous regarder, vous frôler, respirer votre odeur, et ne pouvoir seulement nous toucher, vous que je berçais sur mes genoux, éperdue de désirs, et penser qu’un autre que moi vous a possédée, vous, vous la sainte et la fidèle amie que je vénérais, cela c’est un enfer d’où je veux m’enfuir. J’espérais d’abord, maintenant je n’espère même pas.