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un amour

maine qu’auparavant. C’était l’autre sans doute qui avait ainsi transformé la femme un peu froide d’autrefois. Une jalousie horrible lui tordit le cœur. Il se leva, s’agenouilla près d’elle, les mains jointes sur le bras du fauteuil, et il lui dit :

— Marthe, je me suis trompé, il me semblait que je ne vous aimais plus assez, et puis, loin de vous, j’ai vu ma folie, j’ai erré partout comme un vagabond, traînant ma douleur d’hôtel en hôtel, n’osant pas revenir et implorer mon pardon. Mais maintenant je ne peux plus, je sais bien qu’entre nous c’est irréparable ; vous ne voulez plus de moi, du moins, ne soyez à personne.

Il croyait à la sincérité de ses paroles. Tout son amour renaissait, grandi par cette rivalité inattendue. Il entrevit une lutte difficile, et la nécessité d’une conquête à recommencer, d’un long siège à entamer, fortifia sa résolution.

— Ne me repousse pas, murmura-t-il, je serai ton ami, je resterai, comme dans les premiers temps, à te regarder, à t’aimer des yeux, tremblant et faible devant ta beauté. Je me ferai du bonheur avec le bonheur que j’ai goûté ici, à