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frappa à plusieurs reprises sans succès.

— Ouvrez, ordonna-t-il au garçon d’étage qu’on avait réveillé sur la chaise où il somnolait dans un office voisin. Le garçon ouvrit, et, sans entrer, s’effaça.

Mme Destol se précipita la première, impétueusement, et eut un cri d’horreur.

— Ah ! mon Dieu !…

Sous la lumière qui, dans la chambre obscure, venait du couloir, sur le tapis, le corps d’un homme étendu tout de son long, inanimé.

On alluma l’électricité du petit salon. On s’empressa autour du corps.

— C’est M. Baratof, dit le directeur.

— Il est mort, dit Thureau qui, à genoux, examinait Baratof. Et, depuis plusieurs heures, la rigidité commence… Et voyez ce sang sur le col, sur la chemise… Et là, au cou, cette plaie. Il a été assassiné. Directeur, téléphonez au commissariat du quartier, de ma part, de la part de M. Thureau, que le commissaire vienne sans retard, avec un médecin.

Dans l’hôtel, dans cette partie de l’hôtel tout au moins, ce fut l’agitation, l’émotion, la curiosité que provoque toujours la découverte d’un crime. Attirés par les coups frappés, le va-et-vient, les exclamations, les appels du téléphone, des employés montèrent, des voyageurs réveillés parurent, à demi vêtus, à la porte de leurs chambres.

Mme Destol, au comble de l’émotion, était revenue dans le couloir pour ne plus voir le cadavre, et elle disait à Valnais, bouleversé, lui aussi :

— C’est affreux ! C’est affreux ! Mais où est Nelly-Rose ? Et ce n’est pas cet homme qui est venu chez elle puisqu’il n’est pas sorti, qu’il était mort avant minuit. Et du reste, ce n’est pas lui que j’ai vu cet après-midi, chez moi… l’autre était jeune.

— Quel abominable mystère ! dit Valnais. Mais Nelly-Rose… Nelly-Rose… Où est-elle, en effet ?… Avec qui est-elle ?…

Cependant, le commissaire de police et le médecin arrivèrent bientôt, accompagnés de trois agents, et, après les premières constatations, le corps fut transporté dans la seconde pièce de l’appartement, la chambre à coucher, et étendu sur le lit.

Mme Destol et Valnais rentrèrent dans le salon dont la porte fut mise sous la garde d’un agent pour évincer les curieux qui se pressaient dans le couloir.

En présence de Thureau, du médecin et du directeur, le commissaire de police interrogea le garçon d’étage, un homme de petite taille, brun, à l’accent un peu zézayant, et qu’on nommait Manuel.

— Monsieur le commissaire, expliqua-t-il, en faisant de visibles ef-