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préoccupation désagréable et, courant à son boudoir, elle consulta l’annuaire, décrocha le téléphone et demanda le Nouveau-Palace.

Par fortune, elle eut très vite la communication.

— Je voudrais parler à M. Baratof, demanda-t-elle.

— M. Baratof n’est pas encore là, madame.

— Mais, il sera là aujourd’hui sûrement ?

— Madame, il nous l’a télégraphié.

— Alors, vous lui direz que Mlle Destol viendra le voir demain matin.

— Mlle Destol… bien… Mais, mademoiselle, dans l’appartement retenu par M. Baratof se trouve justement en ce moment-ci un de ses amis… Voulez-vous lui parler ?

Nelly-Rose hésita une seconde.

— Oui, dit-elle, veuillez me mettre en communication.


Gérard, après la scène devant le garage, avait marché sans hâte jusqu’au Nouveau-Palace. Il était songeur. Nelly-Rose lui avait paru plus délicieusement jolie encore qu’il ne l’avait imaginé d’après ses photographies.

Il arriva à quatre heures moins quart avenue des Champs-Élysées et, apprenant que Baratof n’était pas là, se fit conduire dans l’appartement réservé du Russe, appartement banal et luxueux qu’il connaissait pour l’avoir occupé, trois ans auparavant, avec Baratof.

Il s’installa dans un fauteuil et il allumait une cigarette lorsque le téléphone sonna. Il vint à l’appareil et décrocha.

— Une personne demande au téléphone M. Baratof, monsieur.

— Qui est-ce ?

— Mlle Destol, monsieur.

Gérard eut un petit tressaillement. Nelly-Rose demandant Baratof ? Qu’est-ce que cela signifiait ?

— Branchez-moi, dit-il.

Pour répondre à Nelly-Rose, il déguisa sa voix, dans une impulsion subite qu’il n’eût pu expliquer.

— Oui, mademoiselle, je suis l’associé et l’ami de M. Baratof et je pourrai peut-être me charger de lui dire…

— Eh bien, voilà, monsieur… Je voudrais voir M. Baratof pour… (la voix de Nelly-Rose hésita un peu comme si elle cherchait quel prétexte invoquer) Monsieur, je suis chargée par la Maison des laboratoires de m’entendre avec M. Baratof au sujet d’une petite réunion que nous voulons organiser en son honneur… Alors, je viendrai au Nouveau-Palace demain matin.

— Bien, mademoiselle… C’est Mlle Destol elle-même qui est à l’appareil ?

— Oui, monsieur.

— Si M. Baratof arrivait à temps,