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Et il répéta :

— Asseyez-vous, mademoiselle, dites-moi le but de votre démarche. Quelle communication voulez-vous nous faire ?

Dès lors, Gérard n’essaya plus de lutter. Les bras croisés, avide d’entendre ce qu’allait dire la jeune fille, et bouleversé d’avance par ses paroles, il écouta.

Nelly-Rose était pâle. La honte et l’émotion la serraient à la gorge. Cependant, la même décision l’animait, et sans regarder le juge, elle prononça en appuyant sur chaque syllabe, cette phrase terrible, où tenait tout le mystère de la nuit passée.

— Monsieur le juge d’instruction, de minuit à sept heures, je n’ai pas quitté monsieur.

Sans lever les yeux, elle désignait Gérard. Il y eut un silence, de stupeur pour le juge et pour le policier ; d’intense émotion pour Gérard.

— Veuillez préciser, mademoiselle, dit M. Lissenay d’une voix grave. Comment avez-vous connu… ce monsieur ?…

— Dois-je résumer, monsieur le juge ?

— Non, mademoiselle. Expliquez-vous en détail.

Nelly-Rose commença :

— Voici, monsieur le juge. Il y a quelques semaines, à une séance du comité de la Maison des laboratoires, dont je suis secrétaire, j’ai proposé une loterie, disant que chacun devrait donner quelque chose. On m’a demandé ce que je donnerais, moi. Dans un accès d’enthousiasme un peu ridicule peut-être, en tout cas irraisonné, j’ai dit : « Tout ce qu’on voudra ! » sans penser au sens que pouvaient présenter ces paroles. Or, une de mes camarades, une Polonaise, prenant la chose au sé-