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Bien plus, on le prit comme fantassin. Fantassin, un Dorgeval, un grand premier rôle, habitué à parcourir les scènes de théâtre sur son palefroi ! Oui, fantassin ! Et comme tel il passa deux mois dans un camp d’instruction, deux mois de supplices ! Et comme tel, c’est-à-dire comme victime désignée d’avance à la mort, il fut expédié sur le front, et, bien entendu, à l’endroit le plus exposé du front.

La fièvre le reprit. Il resta huit jours dans une tranchée de deuxième ligne, à grelotter. Puis il connut l’enfer de la première ligne. Et puis, un matin, ce furent les préparatifs de l’assaut.

Chose étonnante et qui le surprit lui-même, il n’éprouva pas, à l’annonce de cet assaut, la peur qu’il redoutait. Et cela, sans doute, pour la raison qu’il avait résolu de se faire blesser. « Une bonne balle, se disait-il, et j’en serai quitte. » Il avait même choisi l’endroit de la blessure, le gras du bras. Il souf-