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moindres bibelots dont elle s’entourait. Aux murs sont pendues les esquisses où j’essayais jadis de fixer le charme de son visage ou la grâce de son corps. Derrière un voile, exhaussée par une marche sur laquelle je m’agenouille, elle se dresse, toute blanche en sa nudité de marbre.

Et je reste des heures à me souvenir d’elle.


… Je ne puis parvenir à créer ici la sensation de la vie. Tout, au contraire, me dit la mort de Fernande, depuis le fantôme flasque des robes accrochées, jusqu’à l’immobilité froide de la statue.

De rares fois je réussis à l’évoquer. Je la sens. Elle s’approche. Elle m’enlace. Mais sitôt que je la regarde, la vision s’évanouit, car j’ai horreur de sa figure indifférente. Pas un de ses traits ne s’anime. C’est un sourire figé, ou une tristesse immuable, ou plutôt une physionomie vide, nulle, indifférente, morte.

D’elle, pourtant, j’ai tout ressuscité autour de moi, la courbe de ses hanches, la splendeur de ses seins, la noblesse de ses jambes, la couleur de ses cheveux. D’où vient donc que je ne puisse la ressaisir entièrement ? Elle m’échappe. C’est elle et ce n’est pas elle. Quelque chose manque à la résurrection que j’ai tentée. Quoi ?


… Aujourd’hui, durant ma prome-