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ARSÈNE LUPIN

rielle et décisive, je ne songeais même pas à le redouter, mais cette preuve, miss Nelly se déciderait-elle à la fournir ?

Serais-je trahi par elle ? perdu par elle ? Agirait-elle en ennemie qui ne pardonne pas, ou bien en femme qui se souvient et dont le mépris s’adoucit d’un peu d’indulgence, d’un peu de sympathie involontaire ?

Elle passa devant moi, je la saluai très bas, sans un mot. Mêlée aux autres voyageurs, elle se dirigea vers la passerelle, mon kodak à la main.

Sans doute, pensai-je, elle n’ose pas, en public. C’est dans une heure, dans un instant, qu’elle le donnera.

Mais, arrivée au milieu de la passerelle, par un mouvement de maladresse simulée, elle le laissa tomber dans l’eau, entre le mur du quai et le flanc du navire.

Puis, je la vis s’éloigner.

Sa jolie silhouette se perdit dans la foule, m’apparut de nouveau et disparut. C’était fini, fini pour jamais.

Un instant, je restai immobile, triste à la fois et pénétré d’un doux attendrissement, puis je soupirai, au grand étonnement de Ganimard :

— Dommage, tout de même, de ne pas être un honnête homme…