limousine, nous prendrons la limousine. Où est Firmin ?
Firmin, apparaissant. — Monsieur ?
Gournay-Martin, vivement. — Jean, le mécanicien, appelez-moi Jean.
Germaine, même jeu. — Nous arriverons avant les domestiques. Arriver dans une maison pas installée…
Gournay-Martin, même jeu. — J’aime mieux ça que d’arriver dans une maison cambriolée. Ah ! Et les clefs de la maison ? Il faut pouvoir rentrer chez nous.
Jean, qui est entré. — Monsieur m’a demandé ?
Germaine. — Tu les as enfermées dans le secrétaire.
Gournay-Martin. — Oui, c’est vrai. Allez vous apprêter, maintenant. Allez vite. (Elles sortent.) Jean, nous partons, nous partons tout de suite pour Paris.
Jean. — Bien, monsieur. Dans la limousine ou le landaulet ?
Gournay-Martin. — Dans la limousine. Dépêchez-vous. Ah ! ma valise !
Il sort à droite. Jean resté seul siffle. Apparait Charolais père suivi du troisième fils. Scène très rapide jouée sourdement.
Scène VII
Charolais père, à voix basse. — Eh bien ?
Jean, même jeu. — Eh bien, quoi, ils partent, ils partent pour Paris. Naturellement !… chaque fois qu’on fait un coup, on a la manie d’avertir. C’était si simple de cambrioler l’hôtel à Paris sans envoyer de lettre. Ça les a tous affolés.
Charolais père, même jeu, il fouille les meubles. — Imbécile ! Qu’est-ce u’on risque ? C’est dimanche. Et les affoler, c’est ce qu’on a voulu. On a besoin de leur affolement pour demain, pour la suite et pour le diadème. Oh ! ce diadème ! mettre la main dessus.
Jean. — Le diadème est à Paris.
Charolais père. — Je commence à le croire. Voilà trois heures que nous fouillons le château. En tout cas, je ne m’en vais pas sans les clefs.
Jean. — Elles sont là, dans le secrétaire.
Charolais père, courant au secrétaire. — Animal ! Et tu ne le disais pas !
Jean. — Mais le secrétaire est fermé.
Charolais père. — Poussière !
Bernard Charolais, entre. — C’est fait, papa.
Charolais père. — Ton frère ?
Bernard Charolais. — Il est aux communs. Il attend Jean.
Charolais père, à Jean. — Vas-y. Ah ! comment est la route pour Paris ?
Jean. — Bonne. Mais avec le temps qu’il fait, il faudra prendre garde aux dérapages.
Il sort.
Charolais, troisième fils, prenant le pendentif sur le chiffonnier. — Oh ! papa, ce bijou ?
Charolais père, vivement. — Ne touche pas à ça. Ne touche pas à ça.
Charolais, troisième fils. — Pourtant… papa…
Charolais père — Ne touche pas à ça ! (Le fils repose le bijou.) Qu’est-ce que fait le pante ?
Charolais, troisième fils, se dressant sur la pointe des pieds et regardant au-dessus des rideaux de la porte vitrée de droite. — Il fait sa valise.
Bernard Charolais. — Les autres doivent en faire autant.
Charolais père. — On a quelques minutes… (Essayant de forcer le secrétaire.) Pourtant, il nous faut ces clefs.
Bernard Charolais. — On pourrait peut-être s’en passer.
Charolais père. — Nous verrons ça quand nous les aurons. Ah ! ça y est ! T’as les clefs de rechange ?
Bernard Charolais. — Voilà. Il lui jette un trousseau de clefs.
Charolais père. — Oui, ça ressemble. (Il met les clefs dans le tiroir qu’il referme.) Filons, maintenant.
Charolais, troisième fils. — Attention ! Le pante.
Précipitamment, il se colle contre le mur à côté de la porte de droite. Charolais père et Bernard se collent contre le mur du côté du battant de gauche de la baie et derrière le piano. Gournay-Martin entre avec sa valise. Dès qu’il est entré, Charolais troisième fils sort de derrière la porte, entre dans la chambre et ferme la porte. Gournay-Martin, ahuri, se retourne. Au même instant, Charolais père se glisse en dehors, suivi de son troisième fils qui ramène violemment sur lui le battant de la baie. Un temps. Effarement de Gournay-Martin.
Scène VIII
Le Duc, entrant de gauche avec sa valise, puis Germaine. — Eh bien, nous partons. Germaine n’est pas encore descendue ? Allons, bon, qu’est-ce que vous avez encore ?
Gournay-Martin, ahuri. — Je ne sais pas… je ne sais pas…
Il m’a semblé entendre… (Il ouvre avec précaution la porte de droite.) non, il n’y a personne. (Il ferme la porte.) Je vis dans
un cauchemar, dans un cauchemar ! Ah ! mes clefs !
Il va au secrétaire, prend ses clefs et les met dans sa poche.
Firmin, accourant, bouleversé. — Monsieur ! Monsieur !
Tous. — Qu’est-ce qu’il y a ?
Firmin. — Jean, le mécanicien, il avait un bâillon sur la bouche… il était ligoté.
Tous. — Qu’est-ce que vous dites ?
Jean, arrivant, il est dans un état effrayant, col arraché, cheveux en désordre. — Enlevées… volées… les autos.
Tous. — Quoi ?
Gournay-Martin. — Parle… mais parle
Le Duc. — Qui les a volées ?
Jean. — Les quatre messieurs.
Gournay-Martin, s’effondrant. — Les Charolais !
Jean. — Il n’y a que la cent-chevaux qu’ils n’ont pas prise.
Le Duc. — Heureusement !
Gournay-Martin. — Ah ! c’est trop, cette fois c’est trop !
Germaine. — Mais comment n’avez-vous pas crié, appelé quelqu’un ?
Jean. — Appeler ! Est-ce que j’ai eu le temps ? Et puis quand même… tous les domestiques sont partis.
Gournay-Martin. — Épouvantable !
Le Duc, à Gournay-Martin, vivement. — Allons, allons, ce n’est pas le moment de manquer d’énergie. Puisqu’il reste la cent-chevaux, je vais la prendre.
Germaine, vivement. — Nous allons tous la prendre.
Gournay-Martin, vivement. — Voyons, tu es folle, il n’y a que deux baquets. (On entend l’orage qui gronde. La pluie commence à tomber.) Et puis regarde ça, regarde ce qu’il va tomber.
Germaine. — Oui, tu as raison.