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ARMELLE ET CLAUDE

Ils plaisantèrent les premiers jours, comme deux enfants qui découvrent quelque jeu nouveau, leur projet ne pouvant encore leur sembler qu’une émancipation charmante et le loisir d’être jeunes et insouciants. Les combles poussiéreux du manoir furent mis au pillage. On en tira maintes défroques, draperies, ferraille, bahuts et candélabres, dont s’enjoliva la salle du donjon. Sur le mur, des chapes de velours noir à croix en relief s’écartelèrent comme des chauves-souris crucifiées. L’aigle d’or d’un lutrin prit son vol vers les solives du plafond. Deux armures gardèrent l’entrée, fort dignes. Ils s’y introduisaient et, par gestes et paroles, se défiaient en combat singulier.

La joie du rire les ramenait à leurs années naïves. Il tintait clair et frais. Les crises s’achevaient en langueurs béates où ils avaient l’impression de n’avoir point perdu leur temps. Peut-on mieux faire que de rire ?

Claude y prêtait, s’oubliant parfois à reprendre auprès d’Armelle son rôle de galan-