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ARMELLE ET CLAUDE

— Pensez-vous ce que vous dites ? Pensez-vous que l’amour doit être un asservissement, une immolation perpétuelle de soi-même ? Doit-on se courber et se traîner à terre parce que l’on aime ? Doit-on mépriser toute aspiration noble si elle ne participe pas à notre amour ? Est-ce là votre idéal ? Répondez franchement.

Elle le questionnait d’un ton impérieux et, comme il se taisait, elle insista :

— Le pensez-vous ? répondez sans détours… répondez avec la loyauté d’un homme qui s’interroge… le pensez-vous ?

— Non… non… je ne le pense pas.

Tout de suite il eût voulu se reprendre, raisonner, faire la part du faux et du vrai, affirmer que si des doutes, depuis peu, l’obsédaient, du moins telle avait été sa conception réelle de l’amour. Mais en vain il se débattit. À travers tous les obstacles, elle avait pénétré jusqu’au seuil même de sa conscience, et il ne put que répéter :

— Je ne le pense pas, non, je ne le pense pas.