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ARMELLE ET CLAUDE

Elle avait peu de voix, mais elle en tirait des sons d’une gravité douloureuse et des accents naïfs qui prêtaient aux poèmes le relief de petits drames intenses.

Claude s’émerveilla de lui découvrir un tel charme. Et au lieu de s’en réjouir, il se demandait :

— Pourquoi ne m’a-t-elle pas réservé ce plaisir, à moi, le premier ? Pourquoi l’en gratifier, lui, cet intrus ?

Le regardant, il fut assailli d’un mal encore plus vif, tant le secret du jeune homme se lisait sur son visage. Il contemplait Armelle avec une admiration ingénue qui ne se souciait guère des choses exprimées, ni de la voix mélodieuse, ni des nuances exquises, mais s’adressait tout entière à la femme elle-même. Il avait l’air extasié d’un fervent. Nulle lueur de convoitise ou d’espoir n’allumait ses yeux. Ils tâchaient simplement à captiver l’image de ce qu’il y avait au monde de plus beau et de plus magnifique.

Il aimait. Claude n’en douta pas, et il en souffrit.