Page:Leblanc - Armelle et Claude, 1897.djvu/132

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
122
ARMELLE ET CLAUDE

Elles sont toutes troublantes et mystérieuses, mais celle dont ils apercevaient la bordure sombre fut chantée sous le nom de Brocéliande, et la poésie des légendes l’orne d’un charme plus redoutable. Merlin, fils d’un démon incube et d’une religieuse, y vécut sous l’empire de Viviane. Et la fontaine de Baraton, dont quelques gouttes jetées au seuil de son palais opéraient de prestigieux miracles, mugit encore la veille des orages.

Dans le gouffre ténébreux ils s’enfoncèrent avec l’impression qu’aucune issue ne leur permettrait plus d’en sortir. On eût dit une crypte illimitée que couvrait la voûte des frondaisons impénétrables et que soutenaient les arbres pareils à des colonnes symétriques. Une clarté de nuit étoilée l’emplissait. Entre les branches filtraient des rayons de soleil ainsi qu’à travers des soupiraux. Leur chevauchée remuait des couches de silence et de paix, comme si nul pied, n’avait jamais foulé cette mousse vierge et nul regard violé la pudeur de cette ombre.