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ARMELLE ET CLAUDE

— Notre bonheur !… répéta Claude.

Ils craignirent soudain de le perdre. Quoiqu’il ne fût pas encore selon leur espérance, ils le trouvaient si doux qu’aucun autre ne les tentait. L’harmonie conquise était suffisante, et c’eût été bon d’en jouir ici de façon tranquille et immuable.

— Claude, reprit Armelle peureusement, où allons-nous ? Si loin que nous allions, il est toujours un point où il faudra nous arrêter. Pourquoi pas maintenant ?

L’avenir les inquiétait. Il semble parfois qu’on le peut supprimer en s’immobilisant en quelque retraite de béatitude et qu’il n’est plus qu’un présent qui se prolonge indéfiniment. Mais ils savaient que leur marche n’était pas terminée ; et Claude fit avec tristesse.

— Il y a des routes où il faut marcher toujours quand on s’y est engagé… le repos ou le recul sont impossibles, bien qu’au bout ce soit peut-être l’amertume et la douleur.

Ils partirent gravement. L’angoisse des forêts doublait par avance leur mélancolie.