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s’était-elle pas expliquée aussitôt sur ce miroir ?

Une idée l’effleura, et il dit, un peu au hasard :

— Vous connaissiez Louis de Malreich ?

— Oui, fit-elle en l’observant, comme si elle s’efforçait de deviner les pensées qui l’assiégeaient.

Il se précipita vers elle avec une agitation extrême :

— Vous le connaissiez ? Qui était-ce ? Qui est-ce ? Et pourquoi n’avoir rien dit ? Où l’avez-vous connu ? Parlez… répondez… je vous en prie…

— Non ! dit-elle.

— Il le faut, cependant… il le faut… songez donc ! Louis de Malreich ! l’assassin !… le monstre… Pourquoi n’avez-vous rien dit ?

Elle s’approcha de Lupin et d’une voix très ferme :

— Écoutez, ne m’interrogez jamais, parce que je ne parlerai jamais… C’est un secret qui mourra avec moi… Quoi qu’il arrive, personne ne le saura, personne au monde, je le jure…


Chapitre IV

Les Trois crimes d’Arsène Lupin


I


Lupin ne partit pas.

Ce n’était pas un homme à laisser la direction de ses affairés entre les mains d’une femme… d’autant moins que cette femme, si elle conservait toujours sur lui un pouvoir de séduction et de charme, représentait une force mystérieuse qu’il voulait réduire.

Et avec le caractère de Lupin, un tel antagonisme prenait rapidement les allures d’un combat où il fallait que l’adversaire demandât grâce. Et l’adversaire en l’occurrence, devenait Dolorès Kesselbach.

Il resta donc, mais dans quel état d’agacement et d’inquiétude ! Il lui était physiquement douloureux de vivre dans cette atmosphère, lourde, équivoque, indécise,