Page:Leblanc - 813, paru dans Le Journal, du 5 mars au 24 mai 1910.djvu/421

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Ça y est ! une fois de plus j’ai gagné le gros lot… Et quel lot ! Un grand-duché, un royaume !

Il plaqua sa main sur l’épaule de Pierre Leduc.

— Veinard de veinard ! Dans trois mois, tu épouses Geneviève ! Dans dix mois tu remontes sur le trône de tes ancêtres, et je règne ! Je règne sous ton nom ! Lupin, grand-duc ! J’étais chef de la Sûreté, me voilà prince régnant ! Le maître !… Le maître absolu !… Et alors… Alors on verra. Oui, le monde verra…

Il s’arrêta, et face à Pierre Leduc, les yeux brillants de fièvre, la voix sourde, il prononçait :

— À ma gauche, l’Alsace-Lorraine… à ma droite, Bade, le Wurtemberg, la Bavière… l’Allemagne du Sud… tous ces États mal soudés, mécontents, écrasés sous la botte du Charlemagne prussien, mais inquiets, tout prêts à s’affranchir… Comprends-tu, poète, tout ce qu’un homme comme moi peut faire là au milieu, tout ce qu’il peut réveiller d’aspirations, tout ce qu’il peut souffler de haines, tout ce qu’il peut susciter de révoltes et de colères ?

Et tout bas, il répéta, le regard tourné vers l’ouest :

— Et, à ma gauche, l’Alsace-Lorraine…


II


Après avoir ramené Pierre Leduc au château de Bruggen, Lupin reprit la route de Paris.

Un intérêt considérable l’y attirait : l’affaire de Malreich et des sept bandits.

Ce que fut cette affaire, la façon dont elle fut conduite, et comment elle se déroula, il serait fastidieux d’en parler, tellement les plus petits détails sont présents à la mémoire de tous. C’est, un de ces événements sensationnels que les paysans les plus frustes des bourgades les plus lointaines commentent et racontent entre eux.

Mais ce que je voudrais rappeler, c’est