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vérité. Pour son salut, il fallait ma mort, et elle s’y décida.

Plusieurs fois, il répéta pensivement :

— Et pourtant, elle m’aimait… Oui, elle m’aimait, comme d’autres m’ont aimé… d’autres à qui j’ai porté malheur aussi… Hélas ! toutes celles qui m’aiment meurent… Et celle-là meurt aussi, étranglée par moi… À quoi bon vivre ?…

À voix basse, il redit :

— À quoi bon vivre ? Ne vaut-il pas mieux les rejoindre, toutes ces femmes qui m’ont aimé ?… et qui sont mortes de leur amour, Sonia, Raymonde, Clotilde Destange, miss Clarke ?…

Il étendit les deux cadavres l’un près de l’autre, les recouvrit d’un même voile, s’assit devant une table et écrivit :

« J’ai triomphé de tout : et je suis vaincu. J’arrive au but et je tombe. Le destin est plus fort que moi… Et celle que j’aimais n’est plus. Je meurs aussi. »

Et il signa : Arsène Lupin.

Il cacheta la lettre et l’introduisit dans un flacon qu’il jeta par la fenêtre, sur la terre molle d’une plate-bande.

Ensuite il fit un grand tas sur le parquet avec de vieux journaux, de la paille et des copeaux qu’il alla chercher dans la cuisine.

Là-dessus il versa du pétrole.

Puis il alluma une bougie qu’il jeta parmi les copeaux.

Toute de suite, une flamme courut, et d’autres flammes jaillirent, rapides, ardentes, crépitantes.