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“813”

la douleur augmenta. Et il se rendit compte que l’homme avait réussi à tordre son bras, à glisser sa main jusqu’à sa poitrine et à dresser son poignard. Le bras, certes, était immobilisé, mais à mesure que M. Lenormand resserrait le nœud de l’étreinte, la pointe du poignard entrait dans la chair offerte.

Il renversa un peu la tête pour échapper à cette pointe : la pointe suivit le mouvement et la plaie s’élargit.

Alors il ne bougea plus, assailli par le souvenir des trois crimes, et par tout ce que représentait d’effarant, d’atroce et de fatidique cette même petite aiguille d’acier qui trouait sa peau, et qui s’enfonçait, elle aussi, implacablement…

D’un coup, il lâcha prise et bondit en arrière. Puis, tout de suite, il voulut reprendre l’offensive. Trop tard. L’homme enjambait la fenêtre et sautait.

— Attention, Gourel ! cria-t-il, sachant que Gourel était là, prêt à recevoir le fugitif.

Il se pencha. Un froissement de galets, une ombre entre deux arbres, le claquement de la barrière… Et pas d’autre bruit… Aucune intervention…

Sans se soucier de Pierre Leduc, il appela :

— Gourel !… Doudeville !

Aucune réponse. Le grand silence nocturne de la campagne…

Malgré lui il songea encore au triple assassinat, au stylet d’acier. Mais non, c’était impossible, l’homme n’avait pas eu le temps de frapper, il n’en avait même pas eu besoin, ayant trouvé le chemin libre.