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“813”

souffrance, tout au plus… un peu de ton sang qui coulera. Mais qu’est-ce que c’est, auprès de l’effroi de mourir ?

— La souffrance m’est indifférente.

— Alors, tout de suite ! clama Sernine. Tout de suite ! dix secondes de souffrance, et ce sera tout… dix secondes, et la vie de l’autre t’appartiendra…

Il l’avait empoigné à bras-le-corps, et, courbé sur une chaise, il lui tenait la main gauche à plat sur la table, les cinq doigts écartés. Rapidement il sortit de sa poche un couteau, en appuya le tranchant contre le petit doigt, entre la première et la deuxième jointure, et ordonna :

— Frappe ! frappe toi-même ! un coup de poing et c’est tout !

Il lui avait pris la main droite et cherchait à l’abattre sur l’autre comme un marteau.

Gérard se tordit, convulsé d’horreur. Il comprenait.

— Jamais ! bégaya-t-il, jamais !

— Frappe ! un seul coup et c’est fait, un seul coup, et tu seras pareil à cet homme, nul ne te reconnaîtra.

— Son nom…

— Frappe d’abord…

— Jamais ! oh ! quel supplice… Je vous en prie plus tard…

— Maintenant… je le veux… il le faut…

— Non… non… je ne peux pas…

— Mais frappe donc, imbécile, c’est la fortune, la gloire, l’amour…

Gérard leva le poing, dans un élan.

— L’amour, dit-il… oui… pour cela… oui…