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“813”

celui qui agit… Il n’y a pas de limites à ma volonté, il n’y en a pas à mon pouvoir. Je suis plus riche que le plus riche, car sa fortune m’appartient… Je suis plus puissant que les plus forts, car leur force est à mon service.

Il lui saisit de nouveau la tête, et le pénétrant de son regard :

— Sois riche aussi… sois fort… c’est le bonheur que je t’offre… c’est la douceur de vivre… la paix pour ton cerveau de poète… c’est la gloire aussi… Acceptes-tu ?

— Oui… oui… murmura Gérard, ébloui et dominé… Que faut-il faire ?

— Rien.

— Cependant.

— Rien, te dis-je. Tout l’échafaudage de mes projets repose sur toi, mais tu ne comptes pas. Tu n’as pas à jouer de rôle actif. Tu n’es, pour l’instant, qu’un figurant… même pas ! un pion que je pousse.

— Que ferai-je ?

— Rien… des vers ! Tu vivras à ta guise. Tu auras de l’argent. Tu jouiras de la vie. Je ne m’occuperai même pas de toi. Je te le répète, tu ne joues pas de rôle dans mon aventure.

— Et qui serai-je ?

Sernine tendit le bras et montra la chambre voisine :

— Tu prendras la place de celui-là. Tu es celui-là.

Gérard tressaillit de révolte et de dégoût.

— Oh non ! celui-là est mort… et puis… c’est un crime… non, je veux une vie nouvelle, faite pour moi, imaginée pour moi… un nom inconnu…