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tomobile tournait brusquement sur la place qui s’ouvre devant la cathédrale, il y eut soudain des cris d’effroi. Clotilde et Raoul aperçurent un groupe d’ombres qui s’écartaient rapidement de droite et de gauche. Mais un enfant fut atteint au passage, projeté…

La direction trembla dans les mains de Clotilde. Elle freina sans pouvoir arrêter sur-le-champ.

D’un bond, Raoul sauta. Les deux hommes ouvraient la portière. Il dit à l’un d’eux :

— Prenez le volant… Emmenez mademoiselle.

Elle voulait descendre, se précipiter vers l’enfant. Il la repoussa.

— Ne vous montrez pas… Ce serait vous perdre… allez… laissez-moi faire.

Et il y avait en lui une telle autorité qu’elle ne résista point davantage. Déjà des silhouettes accouraient, menaçantes. L’automobile disparut dans les ténèbres.

Ce même jour, l’après-midi, Raoul se présenta au château que Clotilde habitait avec son père. Il la trouva seule, pâle d’angoisse. Qu’allait-il lui annoncer ?

Elle balbutia :

— L’enfant ?

— Il vit… Ce ne sera pas grand’chose.

Elle tomba sur une chaise en sanglotant. Et de longues minutes ils restèrent sans parler.

Et quand elle eut pleuré, elle demeura longtemps dans la même attitude, les mains sur sa figure et la taille courbée, et maintenant que l’horrible cauchemar