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CONTES DU SOLEIL ET DE LA PLUIE
LE BON CITOYEN
Lorsque M. Redoré, après avoir cédé
avantageusement son fonds de commerce,
cannes et parapluies, se fut installé
à Gourel, la vie de ce petit village
changea du tout au tout.
M. Redoré avait, lui aussi, des idées
sportives. Il aimait le sport passionnément,
en homme qui n’en à jamais fait,
mais qui brûle d’en faire, non pas pour
lui-même — il était trop tard — mais par
l’intermédiaire d’instruments plus souples
et plus jeunes.
Au fond il y a deux manières d’aimer le
sport : le pratiquer ou en développer la
pratique chez les autres. M. Redoré
adopta celle-ci. Il sert l’initiateur Sportif
de la jeunesse de Gourel.
Tout de suite il s’aboucha avec l’instituteur,
homme de progrès et d’action, qui
comprit merveilleusement tout le parti
qu’on pouvait tirer de ce généreux initiateur.
Il fut entendu que M. Redoré
donnerait chez lui des conférences
auxquelles l’instituteur presserait ses
élèves d’assister. Au besoin même il les
y conduirait.
Ces conférences furent très suivies, du
moins dès le jour où il fut alloué la
somme de cinq centimes à tout enfant
qui s’y rendait. M. Redoré traitait là des
plus hautes questions : amélioration de
la race, relèvement de la patrie, ennoblissement
de l’individu et de l’humanité.
Pour passer de la théorie à la pratique,
l’ancien commerçant était plus embarrassé.
En fait il ne connaissait comme
sports que la marche et la bicyclette. Il
n’y avait pas une seule bicyclette à Gourel.
Il se rabattit sur la marche.