Page:Lebesgue - Leçons sur l'intégration et la recherche des fonctions primitives, 1928.djvu/339

Cette page a été validée par deux contributeurs.
323
SUR LES NOMBRES TRANSFINIS.

bien, les opérations de dérivation donneront toujours des dérivés différents, on aurait un ensemble non dénombrable semblable à de tels dérivés. Nous allons voir que ce cas ne se présente pas.

Considérons l’ensemble des dérivés de , qui existent effectivement, c’est-à-dire contiennent des points, et qui ne sont pas parfaits, à l’exception peut-être du dernier. Ils sont tous différents. Soient , , … les intervalles contigus à , rangés en suite simplement infinie. Soit celui des intervalles contigus à qui contient . Soit l’accroissement de longueur quand on passe de à . Certains des sont nuls ; mais, pour chaque valeur de , certains des sont différents de zéro, puisque est toujours différent de  ; si n’existait pas, on prendrait pour l’intervalle .

Or il ne peut, pour donné, y avoir qu’une infinité dénombrable au plus de valeurs différentes de zéro, car la longueur de ne peut croître au delà de celle de la longueur de l’intervalle contenant l’ensemble donné[1]. Et comme ceci est vrai pour chaque valeur entière de , l’ensemble de tous les différant de zéro est au plus dénombrable. L’ensemble des termes de est donc dénombrable[2], donc :

VI. Tout ensemble de points a soit un dérivé qui ne contient aucun point, soit un dérivé parfait.

VII. Tout ensemble fermé est la somme d’un ensemble fini ou dénombrable et d’un ensemble parfait ; l’un ou l’autre de ces ensembles peut ne pas exister.

En effet, un ensemble fermé est contenu dans son dérivé et celui-ci est la somme d’un ensemble dénombrable au plus et de son dernier dérivé, nul ou parfait.

Ces deux théorèmes constituent la propriété connue sous le nom de théorème de Cantor-Bendixson[3]. Pour donner à la décomposition indiquée par ce théorème toute sa valeur, il faut évidemment remarquer

  1. Nous supposons donc tout entier à distance finie ; cette supposition n’a rien d’essentiel. On traiterait le cas général soit par une transformation telle que soit en décomposant l’ensemble en les ensembles , étant formé de ceux des points de qui sont dans . Pour le cas où n’est pas tout entier à distance finie, il est commode de convenir de dire que le dérivé de contient un point à l’infini.
  2. Nous venons en somme de prouver une propriété générale des suites d’ensembles fermés qui sera énoncée dans le texte dans un moment.
  3. Voir Acta mathematica, t. 2.

    J’ai dit que nous ne nous écarterions pas des idées de Cantor, mais la forme de la démonstration du texte est très différente de celle de Cantor au point de vue suivant. Cantor utilise la conception de l’ensemble total des dérivés différents ou non, que l’on peut attacher à chaque nombre de et il appelle l’ensemble