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L’INTÉGRALE DE STIELTJÈS.

Le point de départ de Cauchy est la notion de grandeurs coexistantes, notion plus large que celle de fonction, dont celle-ci n’est qu’un cas particulier.

Des grandeurs sont dites coexistantes lorsqu’elles sont déterminées par les mêmes conditions, géométriques ou physiques. La surface et le volume d’un cylindre sont des grandeurs coexistantes, déterminées en même temps par la donnée du cylindre. Dans une étendue gazeuse, isolons par la pensée la matière contenue dans un certain domaine ; le volume du corps ainsi conçu, sa masse, la quantité de chaleur nécessaire pour élever sa température d’un degré à volume constant sont trois grandeurs coexistantes.

Les nombres qui mesurent ces grandeurs ne sont pas nécessairement des fonctions les uns des autres, les exemples précédents le prouvent ; ils le sont parfois ; le rayon, la hauteur, la surface, le volume d’un cylindre de révolution sont des grandeurs coexistantes et deux quelconques d’entre elles déterminent les deux autres. D’une façon plus générale, si une grandeur est fonction d’autres grandeurs, toutes ces grandeurs sont coexistantes. Nous sommes habitués à raisonner sur variables et fonctions, mais il y a tout aussi bien lieu de raisonner sur des grandeurs coexistantes : entre la surface et le volume d’un cylindre, on peut, par exemple, établir des relations d’inégalité. Pour donner une base solide aux raisonnements sur les grandeurs coexistantes, précisons cette notion ce qui d’ailleurs va en restreindre la portée.

Dans les exemples précédents, les grandeurs coexistantes apparaissent comme attachées à un même corps, le cylindre ou le corps gazeux, ce sont des fonctions d’un même domaine. Les grandeurs de la physique directement mesurables apparaissent d’ailleurs toujours comme des fonctions de domaine ; seulement ces domaines ne sont pas toujours à trois dimensions. Il peut s’agir de domaines sur la droite, c’est-à-dire d’intervalles, de domaines plans ou de domaines à plus de trois dimensions ; dans ce dernier cas le domaine ne s’impose plus à nos sens, sa conception purement mathématique est quelque peu artificielle. Si, par exemple, nous avions voulu parler de la quantité de chaleur nécessaire pour élever de degrés un corps gazeux C conçu isolé du reste d’une étendue gazeuse et si nous avions voulu faire varier et et le corps, il nous aurait fallu considérer la quantité de chaleur comme attachée