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une fonction continue vérifiant la formule (1). Ceci revient, dans les deux cas traités par Cauchy et Dirichlet, à supposer l’existence des limites qui ont servi dans la définition. Nous supposerons cette condition remplie et nous allons chercher comment doivent être distribués les points singuliers de pour que cette fonction ait une intégrale. Au point de vue qui nous occupe, les points singuliers de sont ceux qui ne sont intérieurs à aucun intervalle dans lequel est continue ; ce sont donc les points de et ceux de , ces points forment un ensemble que nous désignerons par . Tout point limite de points de , par sa définition même, est aussi point de  ; contient donc tous ses points limites. C’est un des ensembles que Jordan appelait parfaits et M. Borel relativement parfaits ; nous appellerons un tel ensemble un ensemble fermé.

Pour que la formule (1) définisse entièrement , il faut que, dans tout intervalle, il en existe un autre où est continue. L’ensemble doit donc être tel que, dans tout intervalle, s’en trouve un autre qui ne contienne pas de points de  ; c’est ce que l’on exprime en disant que doit être non dense dans tout intervalle[1].

Cette propriété de n’est nullement suffisante ; pour énoncer la propriété nécessaire et suffisante que doit vérifier , il faut avoir recours aux propriétés des ensembles dérivés.

L’ensemble fermé a des dérivés successifs , , …, , … ; on sait que, si l’un des dérivés est nul, est dit réductible, c’est un ensemble dénombrable ; sinon l’un des dérivés est parfait, et tous ses dérivés ont la puissance du continu[2].

Ce sont ces propriétés qui vont nous servir. Supposons qu’il existe une fonction satisfaisant à l’égalité (1) dans tous les

  1. P. Du Bois-Reymond, auquel est due la distinction des deux classes remarquables d’ensembles, que nous appelons ensembles denses dans tout intervalle d’une part et ensembles non denses dans tout intervalle d’autre part, appelle les premiers systèmes pantachiques ou pantachies et les seconds systèmes apantachiques ou apantachies. C’est aussi du Bois-Reymond qui a donné le procédé général de formation des ensembles fermés et des apantachies, procédé qui consiste à enlever d’un intervalle des intervalles en nombre fini ou dénombrable convenablement choisis. Au sujet des ensembles fermés et des ensembles non denses, voir Borel, Leçons sur la théorie des fonctions, Chap. III.
  2. Voir la Note placée à la fin du Volume.