Page:Leavitt - Protection des forêts au Canada, 1912.djvu/129

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ment notable dans la composition de la forêt, soit une stérilité complète pendant un temps indéfini, par suite de la destruction des éléments de la fertilité et par l’érosion de ce qui reste du sol minéral. En général, la plantation est nécessaire, si l’on veut obtenir une forêt des essences précieuses sur un brûlé, surtout s’il y a eu incendies répétés, car les porte-graines auront été détruits.

Les adversaires de la loi de l’ébranchage des houppes soutiennent que cette opération tend à accroître la force de l’incendie et la destruction du sol minéral. Ce sujet a déjà été discuté en partie, et l’on a conclu que l’ébranchage a pour effet de produire un meilleur brûlage et un feu plus intense, surtout s’il survient pendant les deux ou trois premières années qui suivent la coupe. Cependant, il ne s’ensuit pas nécessairement que le danger de destruction du sol soit suffisamment grand, lorsque les houppes sont ébranchées, pour fournir un argument irréfutable contre la loi. Si un incendie se déclare après une période de sécheresse, il détruira tout, qu’il y ait eu ébranchage des houppes ou non. Les vastes étendues recouvertes de houppes non ébranchées, dévorées par les incendies de 1903 et de 1908, dans les Adirondacks, en sont une preuve irrécusable. En pareil temps, non seulement les branches, mais aussi l’épaisse couche de végétaux décomposés, ou terreau, seront sèches comme des allumettes, et tout incendie qui éclate alors brûle aussi le sol. Si les branches n’ont pas été brûlées antérieurement, le feu dévorera la terre de surface, et l’ébranchage et le non ébranchage des houppes n’y changeront rien.

On a visité le brûlis du 20 mai 1911, près de Sperry Pond, dans la réserve de Whitney, où les houppes avaient été ébranchées en 1909. L’état des choses en cet endroit a démontré que, lorsqu’il survient des incendies au printemps, le fond des piles de branches de houppes reste plus longtemps humide que dans les endroits où les houppes n’ont pas été ébranchées. On a trouvé au fond de ces piles des menues branches non brûlées ; cela prouve que l’humidité provenant de la neige ou de la pluie s’était conservée plus longtemps que si les mêmes débris avaient été exposés à l’influence de l’air et du soleil.

Donc, on peut conclure, à bon droit, qu’au printemps, un incendie des houppes ébranchées n’endommagera pas le sol autant que celui qui éclate dans une coupe où les houppes n’ont pas été ébranchées, car en ce dernier cas, l’action de soleil et du vent aura desséché la surface. Plus tard, ce sera peut-être l’inverse ; mais, comme on l’a fait remarquer, lorsque les piles des houppes ébranchées seront desséchées, le terreau sera également sec et brûlera facilement, indépendamment de l’intensité du feu de surface.