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LE VOL SANS BATTEMENT

À l’heure où la colonie française d’Égypte va payer à la mémoire de Louis Mouilard une juste réparation en lui élevant, près du Caire, un monument, n’est-il pas douloureux de penser que la dépouille mortelle, de l’auteur de l’Empire de l’Air a subi le sort de celles qui sont envoyées à la fossé commune ? Mouillard mort, aucun membre de sa famille ne s’inquiéta de savoir ce qu’il était devenu. Il avait été enterré dans une tombe louée pour un bref délai. Lorsque Madame Borelli eut réuni la somme nécessaire pour l’acquisition d’une concession pour son mari et ses enfants, elle alla réclamer la dépouille du Maître et ne la trouva, plus : la location n’avait pas été renouvelée à temps.

Dans ce chapitre du récit de la découverte de l’aviation, nous voudrions montrer que l’œuvre ignorée de Louis Mouillard a servi l’avancement de la science d’une manière imprévue ; et que, soit négligence, soit silence voulu, une véritable injustice de l’histoire a été commise à son endroit.

Rentré en Amérique, à la suite du voyage en France où lui avait été révélée l’œuvre de l’inventeur du Caire, Octave Chanute n’avait pas eu de soin plus pressé que de correspondre avec lui. Son sûr instinct ne le trompait pas. Il était évident qu’il y aurait mille choses à apprendre d’un observateur à l’esprit aiguisé par quarante années d’études obstinées.

L’intérêt que lui porta le grand ingénieur américain, dut être des plus sensibles à Mouillard. À quelques considérations scientifiques de son correspondant, au sujet des propositions contenues dans l’Empire de l’Air, il répondit avec un empressement et une simplicité touchante par une lettre qui, d’un seul coup, éclaire la question que nous voulons exposer.