Page:Le vol sans battement.pdf/53

Cette page a été validée par deux contributeurs.
45
L’ŒUVRE IGNORÉE DE L.-P. MOUILLARD

produire. Je n’avais pas pu m’offrir un aéroplane complet.

« Heureusement tout se termina bien. Je mesurai ensuite la distance qu’il y avait de la marque de mes pieds au bord de la route et je trouvai 42 mètres.

« Voici ce qu’il a dû arriver. Par le saut j’atteignais une vitesse de 5 à 6 mètres, et, au moment où je franchissais le fossé, j’ai rencontré une bouffée de la brise qui essayait de s’établir. Elle avait probablement 4 ou 5 mètres de rapidité, ce qui fit un total de… capable de me supporter.

« Je ne dirai pas que j’ai eu l’occasion ni le loisir de savourer les voluptés de la vitesse ; non, loin de là ! J’avais trop peur ! mais, cependant je ne saurais oublier cet étrange effet de glissement que je ressentis. »

L’inventeur n’eut ni l’occasion ni le loisir de savourer à nouveau la joie craintive que lui avait value ce premier vol ; l’essai n’eut pas un heureux lendemain. Reprenant l’expérience sur le même appareil, Mouillard eut une épaule luxée par la pression des deux ailes « qui avaient été ramenées l’une contre l’autre comme celles d’un papillon au repos ».

Des ennuis d’un autre ordre vinrent aggraver la situation de l’inventeur et interrompre fâcheusement ses recherches. Vers cette époque le choléra sévit dans la région d’Alger. Mouillard est atteint. Il n’échappe à une mort certaine, racontera-t-on plus tard, qu’en avalant un verre d’absinthe qui faillit à son tour l’empoisonner. n outre les travaux de la ferme ne donnent pas d’heureux résultats, peut-être en raison de la passion scientifique qui domine le cerveau du propriétaire. Une épidémie décime le bétail. En septembre 1865, Louis Mouillard se décidait à abandonner la lutte, louait la ferme, et quittait l’Algérie pour tenter fortune ailleurs.