Page:Le vol sans battement.pdf/482

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
474
LE VOL SANS BATTEMENT

veut se sentir à chaque instant de force à se mesurer avec les défaillances intellectuelles par la vue de l’évolution.

Au fait, est-ce bien un bon conseil que je donne là ? Est-il réellement bon de s’inoculer un virus aussi actif que celui de l’amour de l’aviation ?

J’en doute fort. Et à ce propos-là, entre nous, en ami bien sincère, si vous n’êtes pas encore pris, précisément empoigné par ce problème, laissez-le, abandonnez-le, n’y pensez plus ; c’est une terrible maladie que vous éviterez.

J’aurais bien dû suivre le conseil que je donne ! mais, je ne savais pas d’abord ; puis je n’aurais pas pu.

J’ai réussi à passer une fois plusieurs mois sans y penser. Je me croyais guéri, quand, un beau jour, levant les yeux en l’air par le plus grand des hasards, je vis un magnifique arrian. Oh ! ce fut fini ! tant qu’il fut en vue, je fus cloué sur place. Et, franchement, il y avait de quoi être immobilisé.

Il passait là-haut luttant lentement contre un vent de tempête pareil à nos grandes bises, avançant peu à peu contre ce puissant courant aérien avec une régularité singulière. De temps en temps, pour résister à ces bourrasques qu’on percevait d’en bas, il s’élevait sans reculer et sans avancer, mais gagnait une hauteur considérable.

C’est surtout cette lenteur qui stupéfie, c’est cette faculté de pénétration quand même dans ce vent violent qui donne le mal de l’aviation. Puis, quand il se mit à décrire ses orbes, ce fut une amplitude indescriptible.

Que Dieu vous préserve d’un pareil spectacle !

Et après qu’il eut disparu, cette majesté dans les allures me poursuivait. Tout ce qu’il avait produit comme acte de vol était d’une analyse simple, il n’y avait aucun mouvement difficile à expliquer ; tout était