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CAUSERIES

remarquons pas que nous ne voyons que des petits oiseaux.

Ce n’est pas le seul vol ramé que nous étudions ici, c’est l’autre vol, celui qui est malheureusement rare, qui est le glissement. Il est un autre mode de se transporter dans le milieu aérien qui est employé par l’oiseau de forte masse, c’est le vol plané, mode de translation qui est absolument l’antithèse de celui des petits oiseaux, procédé duquel on peut dire que, s’il n’est pas exactement inimitable, il a cependant résisté jusqu’à ce jour à tous les efforts intellectuels de l’humanité qui désirait le reproduire.

Le rameur est pour nous un leurre, un phare trompeur qui nous dirige sur les écueils.

Voyez plutôt le grand voilier, quand il est forcé de ramer. Regardez-le avec attention et vous comprendrez de suite ses efforts et sa souffrance. Quand les grands vautours partent du sol plat, ils font positivement de la peine à voir. Ces ailes trop grandes plient à se rompre ; on ne craint pas pour la plume qui est élastique, mais pour l’os qu’on a peur de voir se briser. Puis, ne croyez-pas qu’il essaye de s’envoler franchement comme un pigeon qui part ; bien au contraire, il s’élance à la course avant même de battre des ailes et, au moyen de sauts nombreux et énergiques, il finit par atteindre la vitesse qui permet aux ailes d’être utiles, de pouvoir le porter. Jamais un gros voilier n’a songé à ramer franchement ; il sait qu’il ne le peut pas, il a conscience de l’impuissance de ses ailes et, aurait-il la force, il n’ose les soumettre à cette épreuve.

Et dire que l’aile du plus grand vautour et du plus grand albatros n’a que rarement un mètre cinquante : 1,50+1,50+0,30 = 3,30 ; il y a peu d’oiseaux de cette envergure. L’aile de nos appareils doit avoir au moins quatre mètres : concluez vous-mêmes.