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LE VOL SANS BATTEMENT

« C’est un spectacle que je ne manquais jamais de m’offrir autrefois. Je demeurais dans l’Île ; de mes fenêtres, je voyais les tours, et à chaque grand vent du nord, je faisais l’ascension dans le seul but d’aller voir exécuter cet exercice, qui est très rare par d’autres temps… »

Mais les beaux jours passés dans l’observation enthousiaste, et les études de nature en action, sous l’œil bienveillant d’un père artiste, n’ont point de lendemain.

Un soir de décembre 1856, Jean Mouillard prenait froid en revenant de sa teinturerie, et une mal prompt l’emportait, laissant tous ses enfants non établis. Cette disparition fut un véritable désastre. Adieu la peinture et les longues rêveries devant les tours de Notre-Dame ! Louis Mouillard revint brusquement à Lyon où il trouva sa mère désemparée. L’avenir de toute la famille apparaissait absolument incertain. Louis n’a pas de situation, et n’est riche que de beaux rêves. Sans doute Amédée est presque arrivé au terme de ses études au pensionnat des Lazaristes, mais l’instruction de Henri est à peine ébauchée : il vient de débuter en quatrième classe.

L’aînée des filles, Adèle, a vingt ans ; elle est fiancée à un commerçant de Lyon, qui possède une affaire de mercerie en gros. Elle va quitter la maison paternelle. Et de ses deux sœurs, l’une, Marie, n’a que treize ans, et l’autre, Marguerite, onze.

En outre, voici que les plus chers amis de la famille s’en vont : les Daudet quittent Lyon en 1857. Leurs relations, qui avaient fait le charme de la vie dans cette ville, cessent tout-à-coup ; nouvelle séparation qui dut