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LE VOL SANS BATTEMENT

C’est un élève indiscipliné et bon enfant que l’on manque renvoyer tous les quinze jours ; et auquel on pardonne toujours. Une de ses inventions est restée longtemps célèbre dans la pension : c’est le « jeu du jugement dernier ». Cette réjouissance, nocturne consistait en une sarabande effrénée, dansée à la fois par tous les pots à eau du dortoir, où le jeune Louis avait subrepticement placé des billes et dont, il commandait, par des fils invisibles, les mouvements combinés.

Entre deux plaisanteries de ce genre, son imagination vagabonde lui faisait traverser de fantastiques aventures. Un jour il disparut du collège avec un de ses camarades. Surpris de cette fugue inattendue, et pensant que peut-être il s’en était retourné chez ses parents, les Frères avisèrent ceux-ci. Le petit Louis n’avait pas paru à la maison paternelle. L’absence se prolongeant, on se montra fort inquiet. Mais le père, qui connaissait bien son fils, flaira une plaisanterie. Il se rappela alors, c’était au début de l’année, qu’il avait donné à Louis, pour ses étrennes, le volume de Robinson Crusoé ; sans nul doute, l’enfant était parti chercher des aventures suggérées par cette lecture.

Après quelques recherches, on trouva les deux amis cachés sous une bâche à bord d’un navire amarré dans le Rhône.

« Nous allions peupler une île déserte, déclara le jeune Louis à son père qui le ramenait à la maison.

— C’est une très bonne idée lui répondit celui-ci, mais pour s’en aller si loin, il faut emporter avec soi de quoi manger et s’habiller. Une autre fois, je te donnerai tout ce qu’il te faudra pour cela, mais à condition que tu me préviennes à l’avance ! »

Et l’on reconduisit Louis au collège.

Cette histoire est-elle rigoureusement exacte ? Elle me fut contée par les nièces de Louis Mouillard qui