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LE VOL SANS BATTEMENT

partie la plus mince. Elle passa à moins de cinq cents mètres de nous. A cette distance on voyait et on entendait le bouleversement de l’eau attirée par cet épouvantable aspirateur.

Heureusement nous ne l’avons pas vue de plus près.

Restent les petits courants ascendants artificiels, c’est-à-dire produits par la configuration du terrain.

Un beau spécimen de ce genre de courant est juste situé en vue de mes fenêtres. Le perchoir des vautours, dont j’ai déjà parlé, est une immense carrière demi-circulaire, ayant des parois verticales de cinquante à soixante mètres de hauteur. Une lunette des anciens télégraphes est braquée à poste fixe sur ce point ; je n’ai donc qu’à enlever l’obturateur pour être transporté par le grossissement assez près du perchoir pour ne rien perdre de ce s’y passe. Voici ce qu’on y voit quand le vent du nord-est souffle fort.

Tout oiseau qui vole dans cette moitié de cirque semble être changé en ballon ; il produit l’ascension sans le vouloir. Il n’a plus à lutter contre l’attraction, mais contre le courant ascendant, et s’il a l’intention de ne pas s’élever il est forcé de plier fortement les ailes.

Si on va étudier de près cette action particulière du vent et qu’on se place au sommet de la carrière, le spectacle devient souverainement intéressant. La raison reste confondue par la vue de ces ascensions aérostatiques des énormes vautours qui montent devant le spectateur comme autant de ballons.

L’oiseau sait deviner ces courants, cela se voit ; il a la prescience des mouvements de l’air, aussi se livre-t-il avec plaisir à cet ascenseur dès qu’il a à monter.

C’est un bien étrange spectacle assurément, mais je l’ai déjà dit, il n’a lieu que par le nord-est ; par tout autre vent le phénomène n’a pas lieu, et par le vent du