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LE VOL SANS BATTEMENT

chose à me donner ? L’oiseau vous parle, le milan par gestes, le corbeau avec la voix. Son cri, qui, pour beaucoup d’inattentifs, est un bruit rauque et désagréable, devient pour l’observateur un glossaire assez complexe.

On dit que le vocabulaire de la langue éléphant contient une soixantaine de mots ; celui du corbeau doit être à peu près aussi complet. A force d’attention je suis arrivé à me persuader que je comprends une vingtaine de leurs cris. Il y a une chose certaine c’est que chaque traduction que je donne est corroborée par l’acte de l’oiseau.

Le milan n’a que cinq ou six intonations différentes. Il doit parler par gestes. Je n’ai jamais réussi à comprendre que le cri de guerre et celui de la découverte.

Ces deux oiseaux nichent à la même époque. Les corneilles font deux nids, quelque fois trois. Ils ressemblent assez, en plus gros, aux nids de pies des campagnes d’Europe. Les milans n’en font qu’un, gros, énorme ; on le voit d’une lieue ; le couveuse y est complètement cachée.

La grande occupation du corbeau mâle est de saisir un moment d’absence du milan et de lui voler ses œufs. Il a réussi cette année, mais les milans se sont remis à l’ouvrage et ont refait une nouvelle nichée qui, cette fois, est venue à bien.

Les milans jeunes sont sans voix ; les jeunes corbeaux en ont au contraire dès le jeune âge une superbe qu’ils gardent au reste toute leur vie.

L’extrême jeunesse est complètement différente dans les deux oiseaux. Les corneilles pouvant à peine voler sautent déjà de branche en branche et visitent tout l’arbre où est le nid. Les milans du même âge sont déjà sérieux comme leurs parents. Ils sont perchés la journée entière sur le bord du nid et n’ont d’autre oc-