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m’y rendre, je fus pris d’un vomissement de bile pure, peu abondant, de trois ou quatre gorgées. Rendu près de mon lit, je me sentis très faible et près de perdre connaissance, surtout au moment où je m’y étendis. En quittant mes vêtements je m’aperçus que mon bras gauche était très gonflé, depuis le poignet jusque vers le milieu de l’avant-bras. Cependant je n’éprouvais qu’un engourdissement sans douleur réelle, et que la gêne qui résultait de la distension des tissus.

Je fis faire sur toutes ces parties des onctions et des applications de linges imbibés d’alcoolat de mélisse sur 60 grammes desquels on avait ajouté 1 gramme d’ammoniaque liquide, ce qui fut répété deux ou trois fois dans la soirée. Le pouce droit, le dessus de la main et le poignet de ce côté étaient aussi gonflés, mais à peine en avais-je la conscience. Je pris un bouillon et un peu de vin d’Espagne, n’éprouvant d’autre malaise que celui de la tension de tout le tissu cellulaire de l’avant-bras qui était énormément distendu en avant, jusqu’au pli du bras et presque point du côté du coude.

Je dormis parfaitement pendant la nuit, et le sommeil me surprit une heure et demie environ après mon entrée au lit. À mon réveil, le volume du bras était le même, mais d’une teinte rouge, violacée par places, le sang s’étant extravasé par le tiraillement exercé sur les veines dont les capillaires étaient déchirés. Cependant la peau était comme engourdie, si ce n’est quand j’y exerçais une légère pression dont je ressentais l’action.

Dès le matin je bus une tasse de café au lait avec plaisir, et il s’ensuivit une légère et utile transpiration. Plus tard un potage gras et un peu de vin furent très bien digérés. Je me trouvais on assez bon état de santé pour me lever ; toutes mes fonctions s’exerçant librement. Le bras et la main restaient encore gonflés. Les taches noirâtres avaient pris une teinte violette ; elles se manifestaient principalement dans les parties les plus déclives et surtout vers le bord radial de l’avant-bras et sur le même côté de l’une et l’autre main.

Le samedi, c’est-à-dire, le surlendemain, je repris mes occupations- actives quotidiennes au dehors, et à l’établissement dont je suis le médecin. Je me trouvai tellement bien que je pus commencer mon cours au Muséum, qui était annoncé pour le lundi 14 septembre, c’est-à dire quatre jours après l’accident.