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dont le minimum est de 2 millimètres, ce qui démontre que le coup de plume est toujours le même.

J’ai analysé, comme seconde opération, tous les t du bordereau et tous les t chez Esterhazy ; je ne peux pas vous donner tous les chiffres de mes observations ; je ne pourrai vous donner que la synthèse. La proportion est absolument la même, le rythme, je ne dirai pas géométrique, mais le rythme arithmétique, la proportion est la même chez Esterhazy et chez l’auteur du bordereau, c’est-à-dire que l’auteur du bordereau barre deux tiers de ses t, alors qu’un tiers des t n’est pas barré ; autrement dit, 68 0/0 des t du bordereau sont barrés et 32 0/0 ne sont pas barrés .

Si je prends l’écriture d’Esterhazy, j’analyse tous les t et j’arrive à cette proportion : 65 0/0 des t sont barrés et 35 0/0 de t ne sont pas barrés, c’est-à-dire que chez Esterhazy, comme chez l’auteur du bordereau, cette opération mécanique du barrage des t se reproduit avec une uniformité absolue.

Mais, Messieurs, cela aurait pu être une simple coïncidence, et quand un expert est scrupuleux et consciencieux, il ne se contente pas d’éléments de coïncidence, il pousse à fond les observations qu’il est appelé à faire. Je me suis dit : de ce que 68 0/0 des t du bordereau sont barrés et de ce que 65 0/0 des t d’Esterhazy sont barrés, il ne faut pas en conclure que l’auteur du bordereau et Esterhazy font une seule et même personne. J’ai eu alors recours à une autre opération, et j’ai analysé les t à la fin des mots. J’ai trouve qu’il y avait douze t à là fin des mots, dont quatre étaient barrés et huit non barrés ; j’ai pris alors les lettres d’Esterhazy et j’ai constaté que, dans ces lettres, il y avait quatre-vingt-huit t finaux, dont vingt-deux barrés et soixante-dix non barrés, ce qui donne la même proportion arithmétique, c’est-à-dire que le rythme est ici le même, l’opération mécanique est la même. Tandis que l’auteur du bordereau et Esterhazy barrent deux tiers des t, et ne barrent pas un tiers des t par contre, le t final nous donne cette statistique, c’est qu’un quart est barré chez Esterhazy et dans le bordereau, tandis que les trois quarts ne sont pas barrés.

Autre particularité à propos du t. M. Esterhazy ne se contente pas seulement de barrer son t, mais il continue à barrer aussi les lettres voisines à boucles, c’est-à-dire que quand il a à faire une barre à un t, il ne se contente pas de barrer son t. mais il barre les l ou les f qui précèdent ou qui suivent le t. Prenez les lignes 11 et 14 du bordereau, vous verrez que l'auteur du bordereau a barré les l du mot artillerie. Prenez maintenant une lettre de M. Esterhazy, n’importe laquelle — j’en ai dans mon portefeuille, mais je ne puis vous les montrer — vous remarquerez toujours que les l sont également barrés après un t. Ainsi, dans inutile de dire que, vous verrez que la barre du t s’applique également à l’l du mot inutile.

Si vous voulez me le permettre, j’examinerai encore devant vous, avant de passer à un autre point, la lettre x. Je vous