Page:Le proces Zola devant la cour d assises de la Seine et la cour de cassation, Paris Bureaux du Siècle etc , 1898, Tome 1.djvu/502

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De là une présomption que le fac-similé du bordereau ne doit pas être mauvais. Je dis présomption, monsieur le Président, parce qu’il est évident qu’on peut, avant de faire le clichage, avoir truqué le fac-similé du bordereau, de manière à lui donner une ressemblance avec une écriture quelconque ; mais cette hypothèse est, dans le cas présent, bien invraisemblable.

Je voudrais bien que le témoin qui a dit : « Ce fac-similé ressemble à un faux », ou « ces fac similés », — car on a parlé d’une façon générale, sans précision, — « ressemblent à des faux », m’expliquât comment, quand ces fac-similés ont été publiés en 1896, — on pouvait avoir l’idée de faire (et j’en arrive à l’objet précis de ma déposition) — des fac-similés représentant l’écriture de M. Esterhazy, que personne ne connaissait ou, du moins, à qui personne ne pensait à ce moment-là, en connexion avec l’affaire que vous savez ? Il y a là une très grande difficulté qu’il faudrait expliquer.

Eh bien ! vous entrevoyez mon opinion. Retenez le fond : ces fac-similés, dont je reconnais l’imperfection — je n’aimerais pas à faire travailler mes élèves de l’Ecole des Chartes là-dessus ; ce n’est pas assez net, il y a trop d’empâtement — je dis que c’est l'écriture... veuillez considérer, monsieur le Président, que je dis l'écriture, je fais une réserve — que c’est l’écriture du commandant Esterhazy. Je n’ai là-dessus aucune espèce de doute.

Est-ce aussi la main du commandant Esterhazy ? Ah ! ici il y a une distinction que je suis obligé de faire ; elle est subtile, elle me paraît subtile, et je crois bien qu’elle l’est au fond. Elle paraît résulter du rapport des experts du second procès : je ne suis pas renseigné sur ce qu'il y a dans leur rapport ; mon ancien élève, M. Couard, a été d’une discrétion absolument louable ; mais j’ai entrevu, j’ai lu dans un journal que la théorie à laquelle s’arrêtaient les experts du second procès était que c’était bien l'écriture de M. Esterhazy — et cela me saute aux yeux, que voulez-vous, tout le monde reconnaît cela ! — mais que ce n’était pas de sa main.

Cela peut être, mais je ne sais pas comment on peut arriver à le prouver.

J’ai essayé — il faut toujours procéder ainsi — j’ai essayé pour ma part deux ou trois hypothèses pour expliquer cette dualité : d’un côté l'écriture et de l’autre la main. Aucune n’est admissible. Je vous en ferai grâce : surtout, je crois qu’il serait peu charitable de ma part de les attribuer aux experts du second procès, puisque je les trouve absurdes ! J’espère que ces Messieurs en auront trouvé une qui m’a échappé et qui rendra compte de toutes les difficultés.

Pour en revenir aux fac-similés, je dis qu’il y a un moyen absolument certain de me confondre si j’ai tort ; et il est bien simple, ce moyen ! je ne demande pas qu’on apporte ici l’original même ; mais je demande qu’on veuille bien nous communiquer une photographie qui donnera plus de finesse. Mieux