Page:Le proces Zola devant la cour d assises de la Seine et la cour de cassation, Paris Bureaux du Siècle etc , 1898, Tome 1.djvu/444

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J'ajoute qu'il y a toutes espèces de faits d'intimidation pour empêcher les personnes de manifester leur opinion. Ainsi dans les journaux, on a fait des enquêtes au point de vue de la situation militaire des rédacteurs, afin de leur faire comprendre que s'ils allaient faire leurs treize jours ou leurs vingt~huit jours, ils eussent à prendre garde. (Bruit.)

(Se tournant vers l'auditoire.) Vous protestez? Vous désavouez donc ces moyens!

Ayant été trois ans ministre, j'ai conservé un certain nombre de relations dans le Personnel des administrations — et je puis dire qu'il y a dans le personnel des administrations, — et je puis dire qu'il y a dans ce haut personnel des hommes qui s’ils ne manifestent pas, sont pour la plupart absolument convaincus et ne se gênent pour le dire dans des conversations privées, qui sont absolument convaincus que le procès Esterhazv n’a été qu'une parodie de justice. Toutes ces personnes ont la conviction profonde que M. Emile Zola a agi avec ubne entière bonne foi.

Ayant, par la suite de mes travaux spéciaux de nombreuses relations à l'étranger, et en ce moment-ci faisant une des plus grandes enquêtes industrielles et commerciales qui aient été jamais faite, je puis dire que cette conviction est partagée par toute la civilisation extérieure, par les hommes spéciaux les hommes de science, par les hauts industriels et les commerçants.

Dans les post-scriptum des lettres que je reçois, je trouve partout cette impression: « Mais qu’est-ce que vous faites donc en France? Mais à quoi pensez-vous donc? »

Et, Messieurs, je vous demande à ajouter un mot: c’est que je suis véritablement humilié pour la France de cette impression extérieure.

Nous pouvons bien, En France, nous cantonner entre nous et essayer, — on peut essayer et il peut y avoir des gens qui essaient — de dissimuler la vérité. Mais à quoi bon! Elle est connue complètement en dehors de nos frontière, et quand nous l’étoufferions ici, elle n’en existerait pas moins.

Dans tous les états-majors étrangers, dans le monde diplomatique, dans tous les gouvernements, on connaît exactement ce qu'il en est de l'affaire Esterhazv.

M. Le Président., à Me  Labori — Avez-vous encore une question?

Me  Labori. — Oui, je voudrais bien que M. Yves Guvot eût la bonté de nous dire ce qu'il pense de cette dernière partie du rapport Ravary, qui est le rapport de l’affaire Esterhazv :

Que reste-il de cette affaire si savamment machinée? Une impression pénible, etc.

Mais tous les moyens avaient le même but; La revision d’un jugement légalement — légalement — et justement rendu.

M. Yves Guyot sait-il quelque chose sur ce point?

M. Le Président, au témoin. — Ne parlons pas de l'affaire Dreyfus!