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d’ébranler par des moyens illicites et irréguliers l’autorité d’un jugement définitif, non attaqué par les voies légales ;

Attendu que la loi ne permet pas de livrer à une discussion, même pour en faire ressortir la vérité d’imputations diffamatoires, des décisions de justice définitives, et que le respect de l’autorité de la chose jugée s’oppose à l’admissibilité de toutes preuves constituées pour porter atteinte à cette autorité ;

Attendu que, si les prévenus peuvent établir leur bonne foi, il leur est interdit de le faire en essayant la démonstration de faits dont la preuve n’est pas admise par la loi ; que, s’il en était autrement, la loi n’aurait plus de sanction, puisqu’il serait permis de faire indirectement ce qu’elle prohibe expressément ;

Par ces motifs,

À l’honneur de conclure qu’il plaise à la Cour :

Rejeter des débats les huit faits ou prétendus faits énoncés par les prévenus sous la lettre B dans leur exploit du 24 janvier, en déclarer la preuve interdite.

Fait au Parquet, le 7 février 1898.

Pour le Procureur général empêché,
Signé : Van Cassel.

M. le Président à M. Perrenx.- En réponse au réquisitoire de M. l’Avocat général, avez-vous des observations à présenter, ou vous en rapportez-vous à ce que dira votre avocat ?

M. Perrenx. — Je m’en rapporte à ce que dira mon défenseur.

M. le Président à M. Émile Zola. — Vous en rapportez-vous à ce que dira votre défenseur ?

M. Émile Zola. — Je m’en rapporte à ce que dira Me Labori.

RÉPONSE DE Me LABORI

Me Labori. — Messieurs, tout est un peu exceptionnel, je ne dirai pas dans ce procès, mais dans cette affaire.

M. l’Avocat général, invoquant tout à l’heure un article du Code d’instruction criminelle, dont nous n’avons pas souvent ici l’occasion de voir faire usage, se levait pour faire ce qu’il appelait l’exposé de l’affaire. Je ne m’en plains pas : je ferai seulement observer que cet exposé de l’affaire se ramène à peu près à l’exposé des exceptions de procédure par lesquelles M. l’Avocat général entend s’opposer à la preuve que M. Émile Zola a offerte au jury.

Ce n’est le moment, ni de discuter les reproches, ni de répondre aux insinuations ; quand le moment sera venu, nous expliquerons pourquoi une demande de revision n’a pas été introduite, et s’il plaît à Dieu que ces débats suivent le cours que pour ma part j’en attends, c’est peut-être à nous que reviendra le droit, à la fin de ces audiences, d’admirer que M. le Procureur général ne se soit pas servi de l’article 441 du Code d’instruction criminelle pour introduire, non pas une