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pas fait partie du Conseil de guerre diffamé. En second lieu, nulle part, il n’est allégué une circonstance, si insignifiante soit-elle, mettant sur la trace de prétendus ordres odieux et de l’acquittement criminel relativement à un seul des juges. Les prévenus, Messieurs, se sont si peu préoccupés de la personnalité des hommes qu’ils entendaient noter d’infamie que leurs noms ne sont même pas indiqués dans les notifications qui ont été faites, ni même dans l’article, malgré les développements inusités de ce document ; l’auteur de l’article y reconnaît même qu’il ne les connaît pas.

Il n’y a entre les prétendus faits dont on veut se prévaloir et l’ordre de juger aucun lien de dépendance ni de conséquence. Si même, Messieurs, ces prétendus faits indivisibles correspondaient à une réalité, ils aboutiraient à dire que, les actes préliminaires d’instruction pouvant donner lieu à des critiques, les juges qui auraient apprécié auraient pu de la meilleure foi du monde se tromper, ce qui est l’antithèse exacte d’une complaisance criminelle.

Je ne fais cette supposition que pour démontrer aux prévenus que leur articulation supplémentaire, non seulement n’est pas indivisible avec la diffamation relevée, mais la contredit directement.

C’est là, Messieurs, une pure supposition ; tout a été régulier… Je m’arrête, c’est le fond, je ne veux pas y entrer.

Alors, Messieurs, permettez-moi de prendre devant vous des conclusions qui vont préciser nettement le débat sur lequel j’entends faire porter l’audience. Les voici :

Conclusions de M. l’Avocat général précisant le débat.

Le Procureur général près la Cour d’appel de Paris,

Vu la citation délivrée le 20 janvier à MM. Perrenx et Zola ensemble les significations faites à leur requête à son parquet, les 24 et 25 janvier ;

Attendu que l’article 47 de la loi du 29 juillet 1881 décide que « la poursuite des délits commis par la voie de la presse aura lieu d’office et à la requête du Ministère public, sous les modifications suivantes : 1° Dans le cas… de diffamation envers les cours, tribunaux et autres corps indiqués en l’article 30, la poursuite n’aura lieu que sur une délibération prise par eux en assemblée générale et requérant les poursuites, ou, si le corps n’a pas d’assemblée générale, sur la plainte du chef de corps ou du ministre duquel ce corps relève. »

Attendu qu’en exécution de cette disposition légale, M. le Ministre de la guerre a déposé le 18 janvier une plainte au nom du premier Conseil de guerre du gouvernement militaire de Paris ;

Attendu que cette plainte vise uniquement « la diffamation dirigée contre le premier Conseil de guerre du gouvernement militaire de Paris qui, dans la séance des 10 et 11 janvier 1898, a prononcé