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DÉPOSITION DE M. RANC
Sénateur.

M. le Président. — Maître Labori, quelles questions ?

Me Labori. — Monsieur Ranc voudrait-il avoir la bonté de nous dire ce qu’il pense de l’affaire Esterhazy et, en particulier, de M. Emile Zola et de sa bonne foi ?

M. Ranc. — Pour moi, Messieurs, la bonne foi de M. Zola est entière, absolue. Je sais, monsieur le Président, que vous ne me laisserez pas parler de la violation de la loi et des droits de la défense, qui a été commise dans le procès de 1894 par suite de la non-communication à la défense d’une pièce secrète.

Je dirai donc seulement, monsieur le Président, que M. Zola a dû être légitimement surpris par la manière dont le second procès a été conduit, par ce qui a été un simulacre d’instruction — ce qui, du moins, a paru n’être pour beaucoup de gens qu’un simulacre d’instruction — ce qui, certainement, n’a été qu’un simulacre de débat contradictoire, puisque le plaignant n’y était pas représenté, puisqu’il n’y pas eu de contre-expertise d’écritures, puisqu’après avoir donné lecture de l’acte d’accusation — qui était en réalité un plaidoyer en faveur de l’accusé — on a fait le huis clos partiel, on a fait le silence autour du témoignage du colonel Picquart et des dépositions des experts en écritures.

Cela seul, à mon sens, suffit pour expliquer et pour justifier les sentiments de généreuse indignation auxquels a obéi M. Zola. M. Zola a cherché la vérité, il a voulu la justice; ce qu’il a fait est, à mes yeux, l’acte d’un homme de cœur et de grand courage.

M. le Président. — Maître Labori, avez-vous d’autres questions à poser ?

Me Labori. — Non, monsieur le Président.

M. le Président. — Monsieur Ranc, vous pouvez vous retirer.

DEPOSITION DE M. PIERRE QUILLARD
Homme de lettres.

(Le témoin prête serment.)

Me Labori. — Je crois que M. Quillard a assisté comme publiciste au procès de M. le commandant Esterhazy ou, tout au moins, à la partie publique de ce procès. Je vous prierais, monsieur le Président, de vouloir bien lui demander de nous faire connaître ses impressions d’audience ?

M. Quillard. — J’ai assisté aux audiences du Conseil de