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M. le Président. — Les jurés n’ont rien à voir dans la direction des débats.

Me  Labori. — Il ne s’agit pas de la direction des débats.

M. le Président. — C’est à moi seul qu’appartient la direction des débats, vous entendez bien, et quand je vous dis que vous ne plaiderez pas, vous ne plaiderez pas! Je vous le répète une bonne fois.

Me  Labori. — Nous dirons ce que nous avons à dire.

M. le Président. — Vous ne le direz pas, parce que je vous retirerai immédiatement la parole. Vous poserez des questions, rien de plus.

Me  Labori. — Vous dites que je ne dirai pas ce que j’ai à dire, quand ce sera conforme à la loi!

M. le Président. — Quand le moment de plaider sera venu.

Me  Labori. — Mais avant de plaider, est-ce que je n’aurai pas le droit de dire tout ce que j’ai à dire, conformément à la loi ? J’en demande acte et j’ai l’honneur de déposer des conclusions sur ce point.

Me  Clémenceau. — Je demande la permission de lire l’article 319 pour MM. les jurés.

Voici l’article 319, deuxième partie :

Le témoin ne pourra être interrompu; l’accusé ou son conseil pourra le questionner par l’organe du Président, après sa déposition, et dire, tant contre lui que contre son témoignage, tout ce qui pourra être utile à la défense de l’accusé.

Monsieur le Président, conformément aux termes de cet article, je demande la parole pour dire quel est celui de ces deux officiers qui est dans la vérité.

M. le Président. — Mais vous le direz dans votre plaidoirie.

Me  Clémenceau. — Monsieur le Président, j’ai besoin de le dire devant ces deux officiers, parce que, si je me trompe, l’un des deux me rectifiera.

J’insiste: Je demande la parole pendant que ces deux officiers sont à la barre. Je vous rappelle qu’ils se sont infligé un démenti formel; il n’y a rien de plus grave, dans la catégorie des injures, qu’un officier disant à un autre officier: « Vous en avez menti ! » Je demande la parole pour faire éclater la vérité sur cet incident. Je vous demande de me l’accorder ou de me la refuser. Mais en présence de ces deux officiers ..

M. le Président. — Je vous refuse la parole pour plaider: je vous le répète, il est inutile d’insister.

Me  Clémenceau. — Je demande la parole dans les conditions que je viens de dire.

M. le Président. — Je vous dis que non; retenez-le bien: je dis que non!

Me  Clémenceau. — Monsieur le Président, je demande la parole pour poser une question, et prouver que l’un de ces deux officiers est dans l’erreur.