Page:Le proces Zola devant la cour d assises de la Seine et la cour de cassation, Paris Bureaux du Siècle etc , 1898, Tome 1.djvu/355

Cette page n’a pas encore été corrigée

chaque fois que j’ai dû faire une photographie, le colonel Picquart m’a demandé tantôt de masquer quelques lignes, tantôt quelques mots avec une ligne au milieu. J’ai chaque fois fait les clichés en masquant une partie. Il ne m’a pas donné l’explication du but qu’il poursuivait.

Me  Labori. — Je suis très heureux de la réponse, car elle précise ce point qui m’avait échappé: c’est que jamais M. Lauth n’a entendu dire qu’une opération singulière eût été faite en ce qui concerne la photographie du petit bleu.

M. le commandant Lauth. — Pardon, je dis que je n’ai rien masqué du texte. J’ai dû faire disparaître sur le cliché les traces de déchirures, de manière à donner l’apparence d’un petit bleu absolument neuf et intact.

Me  Labori. — Est-ce qu’on a jamais demandé à M. le commandant Lauth de faire disparaître les apparences de déchirures sur l’original ?

M. le commandant Lauth. — Oh ! cela n’aurait pas été possible.

Me  Labori. — La réponse me suffit. Une dernière question à M. Lauth: Est-ce que le bordereau n’a pas été lui-même en morceaux?

M. le commandant Lauth. — Je l’ai vu une fois dans ma vie; à l’heure qu’il est, je serais incapable de dire s’il y en avait beaucoup ou peu; je sais qu’il a été en morceaux.

Me  Labori. — Est-ce qu’il a été photographié ?

M. le commandant Lauth. — Pas par moi, pas à notre service.

Me  Labori. — L’a-t-il été?

M. le commandant Lauth. — Je crois que oui, je n’en sais rien.

Me  Labori. — En présence des déclarations de M. le commandant Lauth je n’ai, en ce qui me concerne, aucune question à poser à M. le colonel Picquart, car M Lauth m’a donné satisfaction sur tous les points.

Me  Clémenceau. — J’aurais une question à poser. M. Lauth voudrait-il nous dire de quelle manière le petit bleu était déchiré; était-ce en petits morceaux?

M. le commandant Lauth. — Il y en avait peut-être une soixantaine.

Me  Clémenceau. — Des morceaux simples, le petit bleu déplié?

M. le commandant Lauth. — Oui, déplié.

Me  Clémenceau. — Qu’est-ce que cela donnait comme grandeur pour le plus grand morceau?

M. le commandant Lauth. — Peut-être le tiers d’un centimètre, un peu plus, pas tout à fait un centimètre carré.

Me  Clémenceau. — M. le commandant Lauth voudrait-il nous dire comment on a recollé les morceaux? comment matériellement on a reconstitué le petit bleu?

M. le commandant Lauth. — Je n’ai pas d’explications à donner à ce point de vue.