M. le Président. — Encore une fois, l’accusation n’a rien à voir dans cette affaire.
Me Labori. — M. le colonel Picquart est un de nos témoins et je n’accepterai pas qu’on apporte contre lui la moindre insinuation; j’attends que M. l’Avocat général fasse sa preuve.
M. le Président. — Vous voilà encore reparti à plaider.
Me Labori. — Oui, monsieur le Président; je trouve que cela est utile à mon affaire. (Rires.)
M. le Président. — Avez-vous d’autres questions ?
Me Labori. — Oui.
(Se tournant vers le commandant Lauth.) Le timbre dont vous avez parlé, monsieur le commandant Lauth, s’agissait-il de l’apposer sur la photographie ou sur le petit bleu lui-même?
M. le commandant Lauth. — Sur le petit bleu... C’est du moins ainsi que je l’ai compris, puisque le colonel Picquart avait le petit bleu dans les mains.
Me Labori. — Quel était le but de M. le colonel Picquart ?
M. le commandant Lauth. — Il l’a dit lui-même: «Je veux pouvoir dire là-haut que j’ai intercepté cela à la poste.»
Me Labori. — Monsieur le Président veut-il demander à M. le colonel Picquart si cela est vrai?
M. le colonel Picquart. — Non, je n’ai jamais dit cela... On dit toujours que j’ai eu l’intention de faire des masses de choses...
M. le Président, à M. le colonel Picquart. — Remarquez que vous êtes en présence de la déposition de M. Gribelin, qui a été très nette.
M. le colonel Picquart. — La déposition de M. Gribelin s’applique à autre chose; c’était pour mettre un cachet sur une lettre.
M. le Président. — Mais c’est toujours le même procédé.
M. le commandant Lauth. — Le colonel m’a dit: «Croyez-vous qu’on mettrait un cachet?»
Me Clémenceau. — On ne peut grouper deux témoignages qui ne s’appliquent pas à la même chose.
Cela veut-il dire que M. Picquart avait l’intention de faire apposer des timbres faux sur des lettres et non sur un télégramme?
M. le colonel Picquart. — Je demande à poser une question: «Ces Messieurs peuvent-ils dire qu’ils ont vu une seule lettre sur laquelle j’aie fait apposer un cachet?»
M. le Président. — Mais on n’a pas dit que vous l’avez fait, on a dit simplement que vous aviez demandé s'il était possible de faire apposer le cachet de la poste.
Me Clémenceau. — Ce n’est pas ce que dit M. le colonel Picquart; il demande si on peut prouver qu’il a fait cela une seule fois, alors qu’il a été à ce bureau pendant deux années.
M. le colonel Picquart. — Non, pendant un an et demi; j’ai rempli auparavant des fonctions dans d’autres bureaux.
Me Labori, au Président. — Voulez-vous demander à M. Ra-