Page:Le proces Zola devant la cour d assises de la Seine et la cour de cassation, Paris Bureaux du Siècle etc , 1898, Tome 1.djvu/343

Cette page n’a pas encore été corrigée

je vais m’expliquer. Le colonel Picquart vous a dit tout à l’heure que, du temps de son prédécesseur, la première personne de notre service à laquelle étaient remis les dossiers, les paquets, était le commandant Henry; que, du temps de son prédécesseur, le commandant Henry faisait un premier triage, gardait pour lui certains de ces documents et me remettait le surplus; que cette façon de faire s’était toujours pratiquée; qu’au moment où j’étais arrivé à ce bureau, mon prédécesseur n’était pas chargé de prendre une partie de ces pièces; que c’était le commandant Henry qui se chargeait de tout. Mais, pour des raisons que je n’ai pas à expliquer ici, on a cru devoir adjoindre quelqu’un au commandant Henry et le commandant Henrv ne gardait qu’une certaine partie des pièces et on me remettait les autres. Moi, de mon côté, à raison de ce qui s’était passé précédemment, je me croyais toujours sous les ordres du commandant Henry pour ces questions, alors que, pour le reste de mon service, j’étais complètement indépendant et correspondais directement avec le chef de service.

Donc, au moment où nous sommes, c’est-à-dire pendant l’hiver 1896, avant la découverte du petit bleu, — cette découverte date du commencement du mois de mars, — à ce moment-là le commandant Henry seul prenait livraison des paquets entiers. Il triait, retirait ce qui lui revenait et me donnait le reste. Au moment où le colonel Picquart prit son service, cette façon de procéder du commandant Henry, de prendre tous les paquets, d’en garder une partie pour lui et me donner le reste, a cessé ; le colonel Picquart, comme c’était son droit, a demandé qu’après en avoir pris livraison, le commandant Henry lui fît passer les paquets. Il les gardait un, deux, trois, quatre jours, autant qu’il était nécessaire, et me remettait la chose après.

Néanmoins, toujours avant de les donner au chef de service, le commandant Henry faisait son premier triage et retenait une certaine partie des pièces qu’il remettait lui-même au chef de service, quelquefois un ou deux jours après m’avoir donné le restant qui devait m’être transmis.

C’est dans ces conditions, qu’au mois de mars 1896, a eu lieu la remise au colonel Henry; le colonel Henry a pris livraison du paquet, mais il ne se rappelle plus, il ne peut pas affirmer s’il a enlevé tous les papiers qui lui revenaient ou non; il y a de cela dix-huit mois.

Il a ensuite remis le restant au colonel Picquart qui l’a gardé deux ou trois jours, comme d’habitude, et me l’a ensuite donné. Apres avoir pris les papiers, les avoir examinés, j’ai remis ce petit bleu avec d’autres papiers au colonel Picquart, qui les a gardés quelques jours. C’est cela que j’estime à environ vingt jours. C’est la que s’est produite une petite confusion dans le rapport du commandant Ravary; c’est la seconde fois que le colonel Picquart a gardé les pièces, peut-être quinze ou vingt jours avant de me les donner à photographier.