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guerre; j'en ai été extrêmement étonné, parce que les dossiers du personnel sont essentiellement confidentiels.

Maintenant, il y a une chose qui m’a étonné aussi. On a parlé de citations; eh bien! je sais que le général Guerrier, chef de M. le commandant Esterhazy, à Rouen, a fait rayer des états de service de cet officier une citation qui s’y trouvait indûment.

Me Labori. — Si je comprends bien, ce serait une citation à l'ordre du jour de l’armée.

M. le colonel Picquart. — Une citation pour faits de guerre en Tunisie, dont ont parlé les journaux.

Me Labori. — Il se trouverait alors dans les états de services de M. le commandant Esterhazy une citation élogieuse.

M. le colonel Picquart. — Pour faits de guerre en Tunisie. Le général Guerrier m’a dit, à moi, — il est prêt à en témoigner, — qu’il avait fait rayer cette citation.

Me Labori. — Cette citation constituerait un faux ou un renseignement erroné ?

M. le colonel Picquart. — Je ne sais pas le nom qu’on peut donner à cela. (Mouvements divers.)

Me Labori. — Est-ce que M. le colonel Picquart, au moment où il a commencé à informer contre M. le commandant Esterhazy, s’est renseigné sur les notes de cet officier ?

M. le colonel Picquart. — Non. Je n’ai pas osé demander à ce moment-là, le registre du personnel, parce que, le chef du service des renseignements demandant le registre du personnel, c’eût été une accusation immédiate contre le commandant Esterhazy. On m’a reproché de n’avoir pas dit tout de suite à mes chefs quels étaient mes soupçons ; mais, avant de porter une accusation grave contre un officier, j’ai voulu être renseigné.

Me Labori. — Est-ce que l’agent de police dont parle M. le colonel Picquart est encore au service des renseignements au ministère ?

M. le colonel Picquart. — Je le crois.

Me Labori. — Alors, c’est que ses déclarations n’ont pas été suspectées, n’ont pas été considérées comme mensongères ?

M. le colonel Picquart. — Pas du tout.

Me Labori. — M. le commandant Esterhazy aurait été vu, avant toute dénonciation, d’après ce que nous a dit M. le colonel Picquart, dans un état d’affolement extraordinaire ?

M. le colonel Picquart. — Oui, vers le moment de la publication du bordereau par le Matin; c’est cet agent qui m’en a rendu compte.

Me Labori. — C’était justement la question que je voulais poser, parce que M. le colonel Picquart nous avait dit, au cours de sa déposition, qu’il pourrait citer le nom du témoin qui l’avait vu. C’est donc cet agent ?

M. le colonel picquart. — Oui.

Me Labori. — M. le colonel Picquart nous a dit encore une chose, mais je voudrais qu’il précisât sa réponse. Parmi les char-